mercredi 16 mai 2007

L'inerrance de la Bible

Dans son dernier commentaire (lire ici), Tim a souligné un point qui rend irréconciliable le Catholicisme et le Protestantisme. Il s'agit de la question de la suffisance de l'Écriture Sainte comme seul fondement de notre foi. J'exprime une opinion identique à celle de Tim. Pour donner plus de force à cette opinion, on a qu'à s'inspirer de la 1er déclaration de Chicago, qui est très claire à ce sujet. Pour y accéder, vous n'avez qu'à cliquer ici. L'article II de cette déclaration est particulièrement éclairant à ce sujet:

Art. II - Nous affirmons que les Ecritures sont la norme écrite suprême par laquelle toute conscience est liée par Dieu, et que l'autorité de l'Eglise est subordonnée à celle de l'Ecriture.

Nous rejetons l'opinion selon laquelle les symboles confessionnels de l'Eglise, ses conciles ou ses déclarations auraient une autorité supérieure ou égale à l'autorité de la Bible.

15 commentaires:

Anonyme 16 mai 2007 à 11:30  

Je suis à la fois d'accord et pas d'accord Daniel. Je suis d'accord avec le principe de "Sola Scriptura" comprit comme la primauté de l'Écriture sur la tradition. Par contre, les premiers crédos sont la Bible interprétée d'une certaine manière. A Nicée, le problème central était qu'Arius et ses partisans voulaient utiliser "seulement la Bible" pour définir le dogme christologique. Ils en arrivaient à l'interprétation arienne que nous connaissons et ce sont les fidèles à l'orthodoxie qui ont décidé d'exprimer le dogme christologique en catégories grecques. Dans un sens, en prenant que la Bible je doute qu'un premier lecteur en arriverait naturellement aux conclusions de Nicée-Constantinople ou de Chalcédoine. Affirmer l'innérance de la Bible et le Sola Scriptura sont deux choses. De plus, les Réformateurs endossaient pleinement les premiers crédos (voir la confession d'Ausburg par exemple). D'une certaine façon ces premières conciles sont une règle de foi pour l'interprétation biblique : La Bible comprise dans ces limites est la révélation.

Anonyme 16 mai 2007 à 12:55  

J.S.- Je sais que les premiers crédos ont été d'une importance capitale dans la tradition de l'Église et qu'ils ont joui d'une grande autorité. Je sais également que les Pères de l'Église ainsi que les Réformateurs ont endossé les premiers crédos. Jamais, cependant, les Réformateurs ont considéré ces crédos comme étant des textes inspirés. Car pour eux, seule l'Écriture Sainte était inspirée et revêtue de l'autorité divine. C'est d'ailleurs ce qu'ils entendaient par la Sola Scriptura. Cela étant dit, je ne comprends pas pourquoi tu dis qu'"affirmer l'inerrance de la Bible et le Sola Scriptura sont deux choses". Il est vrai qu'il s'agit de deux choses distinctes, pourtant le bout de texte de la déclaration de Chicago que j'ai cité, bien qu'il s'inscrive dans un ensemble textuel concernant l'inerrance biblique, n'en demeure pas moins un sur la Sola Scriptura.

Ta préoccupation, à mon sens, concerne surtout notre "lien herméneutique" à la Bible: comment interpréter le texte. À ce propos, les crédos sont en partie décisif, et je dis bien en partie, car je ne vois pas pourquoi des lecteurs modernes ne pourraient pas parvenir à des conclusions similaires à celles des premiers docteurs chrétiens qui nous ont donné les dogmes christologiques. Le Saint Esprit qui les a guidés dans leur interprétation des textes bibliques ne pourrait-il pas nous guidé de la même façon aujourd'hui? D'ailleurs, si nous persistons à endosser ces crédos, c'est bien parce que nous y percevons la vérité.

Anonyme 16 mai 2007 à 15:48  

À quelque part, je crois qu'un lecteur qui lit la Bible pour la première fois ne pourrait pas arriver aux mêmes conclusions, premièrement parce que les objections rencontrées au début de l'église ne sont plus présentes.

Pour ce qui est de l'innerance de la Bible, je n'aime vraiment pas le terme "inerrance" car il ne veut pas dire la même chose d'une personne à l'autre. Pour certains, l'inerrance c'est le fait que la Bible parlerait de la vérité d'une position atemporelle sur tous les sujets. Par exemple, quand il est parlé que la terre repose sur quatre pilliers, on ne se sent pas obligé de dire historiquement que c'est vrai. Quand Jésus prend le grain de moutarde pour en parler comme le plus petit grain de blé, il aurait peut être dit : eh bien, l'atome est la plus petite chose qui existe... En somme, si par inerrance on veut dire qu'en tout (science, histoire, archéologie, géologie, biologie) la Bible parle d'un point de vérité atemporelle, je crois que c'est une mauvaise conception de l'inerrance. Pour moi, je préfère le terme infaillibilité en ce que la Bible ne désire pas porter à l'erreur et communiquement véritablement et vraiment le message de salut. C'est en ce sens que je dis qu'ils sont deux choses.

Anonyme 17 mai 2007 à 07:25  

Je comprends également l'importance des crédos, à la fois pour les chrétiens de l'époque et pour notre compréhension aujourd'hui. Cependant, ils ne sont pas nécessaires à la compréhension de la Bible, utiles mais pas nécessaires. Je crois que la Bible est la parole de Dieu, SEUL texte inspiré, et donc étant l'autorité. Il n'y a pas d'autre autorité, majeure ou mineure. En ce qui concerne l'inerrance, je ne rejette pas le terme à cause de la mauvaise définition de certains. Inerrance signifie sans erreur. C'est un juste qualificatif pour la Bible. L'Écriture n'a pas seulement la primauté sur la tradition et les crédos, elle est la SEULE autorité.
Les crédos sont utiles et importants, mais ils n'ont pas d'autorité spirituelle.
Quant à la lecture qu'un chrétien ferait de la parole aujourd'hui, je crois que la Bible est compréhensible, à la fois par la raison et par le secours du Saint-Esprit.

Anonyme 17 mai 2007 à 12:46  

Je lance une question : Si quelqu'un dit croire en Jésus-Christ mais croit que le Christ a une seule nature ? Si quelqu'un ne croit pas en la trinité mais croit au modalisme ? La Bible ne parle directement ni de "natures du Christ" ni de "trinité".

Pour ce qui est de l'innérance, il faut définir ce que l'on entend par "erreur". Est-ce qu'une inexactitude est une erreur ? Est-ce que ce qui est une inexactitude pour nous mais pas pour l'auteur biblique est une "erreur" ?

Le problème actuel est que les gens arrivent avec une inerrance version "modernité/approche scientifique" et impose au texte plein de choses qui lui sont inconnues car ils prennent toute la Bible comme un ensemble de faits propositionnels plutôt que d'y reconnaître différents styles littéraires.

Anonyme 17 mai 2007 à 20:33  

J.S., je partage plusieurs de tes préoccupations et je dois même avouer que je comprends ta position à l'égard de la Bible et son infaillibilité. D'ailleurs, à ce propos, je te suggère la lecture d'un article de Herman Ridderbos (si tu ne l'as pas déjà lu), The Inspiration and Authority of Holy Scripture, qui résume bien la position à laquelle j'en suis rendu.

Anonyme 18 mai 2007 à 06:05  

Bonjour Daniel,
J'arrive un peu tard dans votre discussion très intéressante. Je suis d'accord avec Jean-Sébastien, surtout depuis que j'ai enseigné un cours sur la Trinité à l'ETEM: mes étudiants - évangéliques - m'ont sorti toutes les hérésies possibles en disant pourtant se fier "seulement sur la Bible": modalisme, arianisme, monarchianisme, trithéisme, etc. Bien sûr la Bible est l'autorité suprême dans l'Église, mais l'interprétation "personnelle" doit être encadrée par l'interprétation de l'Église (les credo oecuméniques des premiers siècles). Prenons par exemple Ac 15: les décisions prises par ce "Concile" à Jérusalem me devaient-elles pas être suivies par les Églises puisqu'elles avaient été prises d'un commun accord par des représentants des Églises réunis? "Il a paru bon au St-Esprit et à nous...". Bref, en tant que croyants nous faisons partie du peuple de Dieu, nous ne sommes pas des individus qui lisont la Bible et pensons arriver seul à une vérité infuse sans prendre en compte la tradition de l'Église et la communauté chrétienne actuelle. Cet "individualisme herméneutique" évangélique explique à mon avis en partie nos 39000 dénominations fondées par n'importe qui qui pense connaître mieux que les autres ce que dit la Bible ("l'Esprit m'a dit ceci ou cela", etc.). Bref, la dichotomie Écritures vs Tradition n'a pas lieu d'être, surtout en ce qui a trait aux premiers siècles de l'Église (au moins jusqu'à Chalcédoine).

Anonyme 18 mai 2007 à 06:17  

Salut Steve,

On ne dit pas que les crédos sont inutiles pour bien interpréter la Bible, ce serait prétentieux et dangereux de faire une telle affirmation. Tout ce que je pense, et je crois que Tim a la même opinion que moi, aisni que toi et J.-S., c'est que les crédos n'ont pas la même autorité que la Bible, parce qu'ils ne sont pas inspirés. Or affirmer cela, ce n'est pas établir une dichotomie entre la Bible et les crédos, c'est tout simplement reconnaître la valeur des crédos versus la valeur de la Bible.

Anonyme 18 mai 2007 à 07:25  

Aussi, pour continuer le commentaire précédent que j'ai fait, je crois que tous les intervenants qui ont répondu jusqu'à présent, ont en réalité la même opinion. C'est uniquement les mots que nous utilisions qui sont différents. Mais en soi, les concepts exprimés par ces mots sont les mêmes, quoique les perspectives soient légèrement différentes. Ainsi, quand je compare la position de Ridderbos (cité dans un commentaire précédent) et celle de la déclaration de Chicago, il est clair pour moi que le choix des mots inerrance (Chicago) et infaillibilité (Ridderbos) traduisent une même et seule description de la réalité des Écritures. Je n'ai pas le temps en ce moment d'offrir des exemples, mais j'espère le faire dans le courant de la journée.

Anonyme 18 mai 2007 à 08:36  

Salut Daniel,
Je vais lire avec attention la similitude que tu établis entre infaillibilité et inerrance.
Je crois cependant qu'il y a encore une petite divergence entre nous - malgré notre position très similaire. Pour moi (je ne sais pas pour Jean-Sébastien), les crédos de Nicée-Constantinople et Chalcédoine sont normatifs pour l'Église. C'est la grille d'interprétation nous permettant de lire la Bible correctement. Vous (toi et Tim) semblez, à mon avis faire encore une dichotomie très moderne entre Écritures et tradition: "c'est que les crédos n'ont pas la même autorité que la Bible, parce qu'ils ne sont pas inspirés.". Bien sûr, la Bible est le texte inspiré - pour la raison très simple que c'est là, et nulle part ailleurs, que nous est présenté LA Parole de Dieu, Christ - mais la manière de l'interpréter est tout aussi décisif ("qui est ce Christ présenté dans les Écritures"): d'où le caractère à mon avis normatif des conciles oecuméniques de l'Église, le "tronc commun" reconnu par toutes les Églises (cathos, protestantes, orthodoxes). Une question pour mieux cerner ce que vous pensez sur le sujet: est-ce que les crédos sont normatifs pour vous ou ne sont que des documents intéressants duquel on peut s'inspirer mais qui ne doivent pas nécessairement recevoir l'assentiment des chrétiens?

Anonyme 18 mai 2007 à 08:46  

Petite précision: c'est parce qu'à mon avis les credos respectent l'E/esprit des Écritures qu'ils sont normatifs. Un credo qui ne le fait pas - ou qui est déconnectée des anciens crédos - n'a aucune normativité, même s'il a été proclamé par une Église qui se dit chrétienne. Par exemple, plusieurs dogmes modernes de l'Église catholique, tels l'infaillibilité papale ou l'Immaculée-conception, n'ont aucune légitimité à mon avis. Tout comme le Filioque, ajouté au crédo sans l'assentiment de la partie orientale de l'Église. Mais bon, c'est un autre sujet.
Un livre intéressant sur le sujet de la tradition est celui de D.H.Williams (un baptiste), Retrieving the Tradition & Renewing Evangelicalism (Eerdmans)

Anonyme 18 mai 2007 à 10:38  

Steve,

Je persiste à croire que nos opinions ne sont pas si divergentes que ça. Seulement, je formule cette question d'une façon différente.

Voici comment je conçois le lien entre la Bible et les premiers conciles et ses crédos (que je considère normatifs, pour répondre à ta question, sans toutefois les déclarer "inspirés"): la Bible contient le message de Dieu, les crédos en donnent un résumé systématique. Sans la Bible, les crédos n'auraient pas existé; et si nous continuons à endosser ces crédos, c'est parce que nous y percevons encore aujourd'hui le message de Dieu enseigné dans l'Écriture Sainte. Dit autrement, on peut affirmer que c'est notre lien herméneutique à la Bible qui nous permet de constater que les crédos sont un résumé fidèle du message divin révélé dans l'Écriture Sainte. Nous interprétons la Bible et, en se faisant, nous reconnaissons que les crédos reflètent bel et bien l'Esprit du texte scripturaire. Bien entendu, je ne parle pas ici d'une interprétation sommaire et sans exégèse de la Bible, mais bien d'une lecture en profondeur du texte biblique. Car il est facile de s'imaginer que nos interprétations rapides de la Bible sont normatives, ce qui veut dire alors: bienvenue les hérésies!

Anonyme 18 mai 2007 à 13:34  

Dis de cette façon, je suis d'accord. Tu as raison, il n'y a pas de divergence.

Anonyme 19 mai 2007 à 06:05  

13 messages ! Vous avez été pas mal prolifiques ! Je crois qu'essentiellement nous sommes d'accord bien que nous approchons la question un peu différemment. C'est pour cela que je parle que personnellement je préfére utiliser le "Sola Scritura" comme un "Primea Scriptura" comme "l'Écriture en premier" et non pas "l'Écriture Seule.". L'autorité de l'Écriture, en l'absence des apôtres (et manifestement parce que la tradition apostolique s'est désagrégée avec le temps) est la première autorité. Mais je considère quand même que la tradition apostolique a pu aussi être tranmise à l'église et aux disciples oralement. En ce sens, il y a peut être certaine pratiques que l'on ne retrouve pas explicitement dans le NT qui se retrouvent dans l'église du début deuxième siècle. Ultimement, si la façon de faire de l'église contredit l'Écriture, je me tiens debout à côté de l'Écriture. Mais si quelque chose est un développement naturel, théologique et/ou nécessaire je me laisse la liberté de dire que cette tradition vaut quelque chose, surtout telles qu'exprimées dans les premiers crédos. En somme, je ne conçois pas les pères apostoliques/apologètes comme infaillibles, il faut garder l'oeil ouvert, mais ce
a quoi tous les églises ont dit oui, je crois qu'il faut considérer important. Je crois que la question que cela amène est : qu'en est-il de la suffisance des Écritures ? Il serait intéressant d'étudier ce qu'il en était dans l'AT car en plus des écrits, les juifs avaient toute la loi orale. (Est-ce que Jésus rabroue toute la loi orale ou certaines traditions humaines qu'ont rajouté les Pharisiens ?). C'est une question à laquelle il faut réfléchir. La question est importante d'autant plus qu'elle touche autant à la question de l'organisation des églises. Les épîtres sont des conversations téléphoniques à un seul sens. Plusieurs interprétations reposent sur nos reconstructions (parfois bonnes, parfois douteuses) du contexte historique (par exemple la place des femmes en 1 Tim 2 et le contexte d'Éphèse). Il y a du matériel pour réflexion !

Anonyme 19 mai 2007 à 10:01  

http://www.the-highway.com/Sola_Scriptura_Mathison.html

Ça vaut la peine et ça illustre bien mon point.