lundi 16 avril 2007

Peut-on s’abstenir de prendre le repas du Seigneur?

Introduction

Je me souviens encore de la première fois où l’idée de s’abstenir de prendre le repas du Seigneur s’est présentée à moi. J’étais à l’époque un nouveau croyant. Pendant une réunion du dimanche matin, peu avant le repas du Seigneur, un frère dans la foi est venu vers moi alors que je chantais les louanges du Seigneur. Le frère en question, tenant une Bible ouverte dans sa main, m’a dit qu’il avait un texte biblique à me lire. C’était Matthieu 5.21-24. Après avoir fait la lecture de ce passage, il m’a expliqué qu’il n’était pas digne de prendre le repas du Seigneur. Je lui ai alors demandé pourquoi il pensait cela. Il a répondu : « Je sais que j’ai commis un péché contre toi et que je ne t’ai pas encore demandé pardon. Il est donc possible que tu ais quelque chose contre moi. J’aimerais donc que tu puisses me pardonner afin de me sentir libre de prendre le Repas du Seigneur. Par contre, si tu ne veux pas régler ça maintenant —qui signifie ici : refuser de lui accorder mon pardon—, je ne pourrai pas prendre le Repas du Seigneur. » En d’autres mots, ce frère considérait mon pardon comme la condition à être remplie pour pouvoir prendre le repas du Seigneur. Il basait cette logique sur le texte de Matthieu 5, que nous venons de lire.

Je me souviens aussi d’autres occasions, où j’ai volontairement refusé de prendre le Repas du Seigneur. La plupart de ces fois, sinon toutes, je m’abstenais de prendre le pain et le vin parce que je me percevais comme étant indigne de le faire, soit parce que j’avais commis un péché dont j’avais terriblement honte, soit parce que ma vie n’était pas en règle avec Dieu ou bien parce que j’avais un conflit non réglé avec une personne. Je laissais donc passé la mie de pain et la coupe de vin, ne prenant rien. Bien sûr, je basais cette décision sur l’Écriture Sainte, plus spécifiquement sur le passage suivant de l’apôtre Paul, qui enseigne aux chrétiens à s’examiner eux-mêmes en prenant le repas du Seigneur :
1 Corinthiens 11.27-30.

Bien entendu, je n’ai jamais été le seul à m’abstenir ainsi de prendre le Repas du Seigneur : j’ai vu bien d’autres croyants faire la même chose, pour des raisons souvent similaires aux miennes. La question que je pose maintenant, après avoir cité ces exemples, est la suivante :

Peut-on, en raison d’un péché non confessé ou d’un conflit relationnel non réglé, refuser de prendre le Repas du Seigneur?

Les textes bibliques qui poussent les gens à s’abstenir de prendre le repas du Seigneur

Considérons maintenant les deux textes bibliques sur lesquels les chrétiens se fondent d’ordinaire pour s’interdire de prendre le Repas du Seigneur. En fait, ce sont les deux textes que j’ai lus auparavant. Relisons cependant ces passages bibliques, pour ensuite les étudier plus en détails.

Lisons d’abord
Matthieu 5.21-24

Lisons maintenant
1 Corinthiens 11.20-34

La question cruciale que l’on doit se poser à ce moment-ci de notre étude est la suivante :

Ces textes enseignent-ils que certaines raisons sont suffisantes pour pousser un chrétien à s’abstenir de prendre part au Repas du Seigneur? Ma réponse à cette question est la suivante : Non!

En fait, aucune raison ne devrait nous inciter à ne pas prendre le Repas du Seigneur. Ni le passage dans Matthieu ni celui dans la première épître aux Corinthiens n’enseignent une telle pratique.

Ce que ces deux textes enseignent

Matthieu 5.21-24

Ce premier texte biblique, avouons-le, ne concerne pas la question du Repas du Seigneur. Il s’agit en fait d’un enseignement de Jésus concernant la gravité d’une action mauvaise (« quelque chose ») commise envers un coreligionnaire (le texte n’explicite pas la nature de ce « quelque chose »), dans le contexte d’une offrande présentée à l’autel. Ce texte ne s’applique donc pas au Repas du Seigneur. D’ailleurs, le Repas du Seigneur est une pratique que Jésus a instaurée vers la fin de son ministère terrestre, bien après la loi des sacrifices révélée à Moïse. Il s’agit donc d’une pratique complètement distincte de celle mentionnée ici par Jésus.

Et même si quelques-uns parmi vous n’étiez pas d’accord avec moi, vous ne pourriez quand même pas prendre ce texte pour justifier le fait que vous vous abstenez parfois de prendre le Repas du Seigneur, simplement parce que, dans le passage en question, Jésus suggère de régler un conflit et ensuite d’aller présenter son offrande, et non de s’abstenir de présenter une offrande.

Un principe important

Ce texte enseigne néanmoins un principe important à retenir : il est facile de pratiquer des rituels religieux complètement vides et dénués de vie. En effet, les Juifs s’imaginaient que le seul fait de se présenter devant Dieu par le moyen des rituels sacrificiels ordonnés par la loi de Moïse, leur accorderait la garantie du pardon de Dieu. Mais Dieu veut la justice qui vient du cœur, non les sacrifices. Il s’agit d’un principe clairement établi dans l’Ancien Testament :
Ésaïe 1.11-13; Amos 5.21-24; Michée 6.6-8. C’est pourquoi, comme Jésus l’enseigne dans le passage de Matthieu 5, Dieu considère qu’il est plus important de résoudre un conflit avec une autre personne que de présenter une offrande à l’autel des sacrifices.

C’est ce principe que Jésus veut souligner vigoureusement dans ce passage biblique. Et ce principe s’applique non seulement au Repas du Seigneur, mais aussi au baptême chrétien, au culte d’adoration, aux ministères dans l’église locale, etc.

1 Corinthiens 11.20-34

Ce passage biblique, contrairement à celui de l’évangile de Matthieu, touche directement la question du Repas du Seigneur. On doit donc s’attendre à y trouver des applications directes sur la manière dont on doit célébrer le Repas du Seigneur.

Dans ce passage, Paul confronte les Corinthiens sur la manière peu gracieuse avec laquelle certains d’entre eux traitaient les pauvres lors du Repas du Seigneur. Au lieu d’attendre ceux qui arrivaient plus tard au repas commun, ces gens mangeaient et s’enivraient. Quand arrivaient enfin les autres membres de l’église, sans doute des esclaves qui devaient terminer leur travail avant de se présenter à la réunion, ceux-ci étaient les témoins d’un spectacle fort triste : une horde de chrétiens gavés et ivres!

C’est pourquoi l’apôtre Paul exhortera les Corinthiens à s’examiner eux-mêmes, pour qu’ils cessent de se comporter grossièrement lors du Repas du Seigneur. Par contre l’apôtre Paul, et j’insiste particulièrement sur ce point, ne mentionne jamais de s’abstenir de prendre le Repas du Seigneur. Paul demande que nous nous examinions, non pour savoir si l’on doit manger le Repas du Seigneur, mais pour qu’on le mange sans le faire avec légèreté. Le texte est en effet très clair à ce sujet, et une bonne traduction biblique communique clairement cette idée :

« Que chacun donc s’éprouve soi-même, et qu’ainsi il mange du pain et boive de la coupe. » (Louis Second)

Le mot « et qu’ainsi » décrit le comportement approprié que doit avoir celui qui prend le Repas du Seigneur : il doit prendre le pain et la coupe dans une attitude d’introspection et d’examen personnel. En d’autres mots, ça ne se fait pas de prendre le Repas du Seigneur sans s’examiner soi-même.

Donc, en s’examinant, deux possibilités s’offrent au croyant:

1. Il peut soit se savoir digne de prendre le Repas du Seigneur,

2. ou il peut se reconnaître indigne de le prendre.

Bien sûr, le problème, c’est lorsque nous sommes trouvés indignes de prendre le Repas du Seigneur. Que faire alors? Paul, en tous cas, n’enseigne pas de s’abstenir de prendre le Repas du Seigneur. Au contraire, il suggère que chaque croyant s’examine lui-même, pour qu’il voit ses fautes, qu’il les confesse et les abandonne. Le Repas du Seigneur, ne s’agit-il pas d’un temps propice pour confesser ses fautes et régler ses voies devant Dieu?

Fausse conception concernant le Repas du Seigneur

On conçoit souvent le Repas du Seigneur comme un acte méritoire : « Je peux le prendre parce que cette semaine j’ai bien entretenu ma relation avec Dieu. » Mais la réalité est la suivante : personne ne mérite de prendre le pain et la coupe! Nous pratiquons tous des péchés d’une manière ou d’une autre et, sur cette seule base, nous ne serons jamais « suffisamment parfaits » pour prendre le Repas du Seigneur. En fait, nous prenons le Repas du Seigneur parce que nous sommes sous la grâce, parce que le corps de Jésus a été brisé et que son sang a été versé pour nous. S’abstenir de prendre le pain et le vin signifie donc:

1. Que nous refusons la grâce de Dieu et le pardon divin.

2. Que nous refusons de nous repentir de nos péchés ou de régler nos désaccords avec nos frères et sœurs.

3. Que nous refusons de discerner notre relation avec le corps de Christ, c’est-à-dire son Église.
a. Cela revient donc à mépriser le corps de Christ, puisque nous ne pratiquons pas des relations où règne l’amour fraternel.

Le but du repas du Seigneur

Pourquoi prenons-nous le Repas du Seigneur? Parce que nous acceptons de participer à la nouvelle alliance mise en vigueur par le sang de Christ. Nous acceptons de la sorte de vivre notre vie en nous soumettant à la volonté du Père et aux normes enseignées par Christ. Le Repas du Seigneur, c’est donc le rappel constant de cette nouvelle alliance gracieusement conclue par le Christ et à laquelle nous nous sommes engagés à participer.

Ok, imaginez maintenant cette petite conversation entre l’apôtre Pierre et l’apôtre Paul :

—Pierre dit : « J’appartiens au peuple de la nouvelle alliance conclue dans le sang de Jésus. »
—Paul, heureux d’entendre cela de la bouche de Pierre, lui répond donc : « Je sais, Pierre, alors viens et prenons le Repas du Seigneur pour commémorer cet événement de la mort de Christ! »
—Pierre répond alors à Paul : « Ah non! Je ne peux pas faire ça. »
—Paul, surpris de cette réponse inusitée, demande à Pierre : « Et pourquoi donc ne peux-tu pas prendre le Repas du Seigneur? »
—Et Pierre de lui répondre : « Tu sais, Paul, je suis un homme extrêmement colérique, je ne suis pas digne de prendre le pain et la coupe. »
—Non satisfait de cette réponse de Pierre, Paul le corrige un peu en lui disant: « Mais Pierre, ne t’es tu pas engagé à marcher avec Christ dans la nouvelle alliance qu’il a conclue en son sang? Comment peux-tu maintenant refuser de commémorer cette alliance? » Christ ne nous a pas demandé d’être parfaits pour participer à cette alliance, il a seulement dit : « Repentez-vous, car le Royaume des cieux est proche. » Le Maître nous a demandé de marcher continuellement en nouveauté de vie et de prendre le pain et le vin pour nous rappeler que c’est son corps brisé et son sang versé qui constituent le fondement du pardon de Dieu envers nous et de cette nouvelle vie. C’est en nous rappelant de ce que Christ a fait pour nous à la croix, donc en prenant le pain et le vin, que nous serons touchés par l’amour du Père envers nous et excités à l’aimer en retour. »

Cette histoire est un peu loufoque, j’en conviens. Mais elle révèle néanmoins à quel point il est illogique de s’abstenir de prendre le Repas du Seigneur.

Nous avons été rachetés à un grand prix pour marcher en nouveauté de vie, et Jésus nous demande de nous rappeler de cela chaque fois que le Repas du Seigneur est servi. C’est là la nouvelle alliance qui a été conclue en son sang.

Conclusion

Frère, sœur, tu te trouves en ce moment devant la Table du Seigneur, dressée là pour te rappeler l’engagement que Dieu a pris envers toi en Jésus-Christ et pour te donner l’occasion de renouveler ta propre consécration envers Christ et l’Église, qui est son corps.

Ne rejette pas cette occasion, pensant que tu es indigne de participer à ce repas. Au contraire, saisis-toi de ce moment privilégié pour t’examiner, confesser ton péché à Dieu et recevoir son pardon, te détournant ainsi de tes mauvaises voies. Comme le disait notre pasteur, « si dans ton cœur subsiste un péché non confessé ou une relation fraternelle encore à régler, alors engage-toi dans ton cœur à entreprendre les démarches nécessaires pour mettre ta vie en règle tout en prenant humblement et joyeusement le pain et le vin ».

Peut-être ne veux-tu pas t’examiner toi-même ni confesser ton péché? Sache que rien ne t’empêche de prendre le Repas du Seigneur. Mais sache aussi que, si tu agis de la sorte, tu démontres par ce comportement que ton cœur est endurci et que tu ne désires plus marcher dans les voies de Dieu. À toi donc qui prends indignement le Repas du Seigneur, l’Écriture déclare que tu attires un jugement sur ta personne. Je t’en supplie au nom de Jésus-Christ, ne te laisse pas aller à une telle folie. N’attends pas que Dieu te corrige pour te ramener à lui, mais viens humblement de toi-même, là, à cette table dressée devant toi, pour confesser et abandonner ton péché.

Soli Deo gloria
À Dieu seul la gloire

5 commentaires:

Anonyme 19 avril 2007 à 10:09  

J'aime bien. J'en ai justement parlé avec les gars du conseil de l'Église hier car la question est survenue.

Bon travail.

Anonyme 19 avril 2007 à 12:26  

Georges,

As-tu suggéré aux gars du conseil de venir lire le présent post?

Bien heureux de voir que tu discutes de telles questions avec ton conseil.

Anonyme 20 avril 2007 à 07:46  

Oui, je leur ai envoyé ta méditation par couriel.

Anonyme 2 mai 2007 à 18:04  

Comme tu me la demandé, je te fait par de mes commentaires.

Je suis totalement d'accord avec toi. Tu a très bien exposé le problème. Et j'irais même plus loin en disant que si on prend le repas du seigneur en se disant assez digne d'y participer le fait dans un esprit opposé à la signification réèlle du sacrement, c,est à dire, nous rappeler que sans l'oeuvre parfaite de Jésus : Pas d'accès au père. On doit vraiment s'examiner et voir si nos coeur sont au diapason avec le message du salut par grâce. D'ou je crois la nécessité de prendre le repas à chaque semaine et bien sur comme tu le montre si bien, prendre le temps d'enseigner sur le sujet afin de BIEN s'examiner.
Continu ton bon travail

En Christ

Anonyme 12 février 2008 à 21:07  

Salut Dan......Je crois que ne pas prendre le repas du Seigneur a rapport avec le fait qu'une assemblée divisée, fait de ce symbole de l'unité de cette même assemblée en Christ, une moquerie de ce que représente la table du Seigneur. En effet une clique ou une personne qui volontairement et sans aucune raison "disciplinaire" refuse la communion/relation avec un frère ( pour lequel Christ est aussi mort et ressuscité, un frère qui est aussi invité à la table de Christ ) ferait mieux non seulement de déposer son offrande pour se réconcilier avec l'autre frère et après cela offrir son offrande à Dieu, mais devrait aussi considérer que ceux que Christ accepte à sa table doivent aussi être accepté de ceux-là même qui ostracisent les "rejects". Accueillez-vous les uns les autres comme Dieu nous a accueillis en Christ dit Le Livre.........Il y aura toujours des conflits.....là n'est pas LE problème en cet âge...le problème est lorsque le frère/la clique ne veut pas aller dans la direction du pardon, de la réparation et de la communion avec ceux pour qui Christ a aussi agi. Si tu ne veux manger avec un frère à ta table ne fais pas le "show" de l'unité à la table de Christ.......celui qui joue cette comédie boit et mange un jugement contre lui-même. Ainsi un frère qui sait qu'il ne veut pas tendre dans la direction du pardon, de la réconciliation et de la communion vers un autre frère serait sage de puiser aux grâces du Seigneur pour chercher l'obéissance à son Seigneur avant de ridiculiser Christ et Sa table par son "hypocrisie-jeu-de-rôle" d'une parodie de l'unité en Christ symboliser par un seul pain/corps, une seule coupe, un seul sacrifice, un seul Christ et un seul Dieu, etc....prendre le pain et la coupe indignement ( anaxios=la considérant sans valeur ) c'est "choisir" mieux que Christ les invités à Sa table. Faire acception de certains selon nos standards n'est pas selon le caractère de Dieu et de son Évangile........Celui qui ne prend pas soin des "siens" est pire qu'un infidèle......mes miens sont aussi et peut-être plus encore ceux qui sont à Christ........Méditons là-dessus et à + en Son amour turluttutu le Guy de JS